Depuis la première publication du Carnet de Vie, j'ai largement traité la notion de conscience de soi. J'ai déjà parlé aussi de la conscience de ses compétences et de ses capacités. Si aujourd'hui je peux prétendre savoir ce que je vaux, cela n'a pas toujours été. Si je fais un feedback j'observe que je me suis souvent trouvée - dans le passé - avec la sensation d'être dans une cage, dans un espace restreint et de ne pas très bien voir comment en sortir. Qui dit cage dit règles auxquelles il faut se soumettre, rester dans le moule. Et qui dit règles dit bien évidemment restriction, donc limites, interdits.
On a vu qu'un des mécanismes pour se faire accepter des autres, c'est de s'adapter, pour être admis dans le groupe ; c'est même parfois se minimiser pour ne pas être jugé trop sévèrement et rejeté.
Je ne sais pas si comme moi vous avez parfois la sensation de manquer d'air. J'ai l'impression qu'il faut que je brime mes élans, mes forces, que je reste 'raisonnable' par principe, parce que ça ne se fait pas... C'est comme quand on a une forte envie de pleurer et qu'on serre les lèvres, qu'on se contracte, parce que pleurer devant des gens, ça ne se fait pas de faire fi des principes.. Parfois, on se lance dans une activité avec d'autres personnes mais on sent bien qu'on serait capable d'aller plus loin encore, de soulever des montagnes ; mais les autres sont là et vous disent :
≪Holà ! Stop ! On ne fait pas ça... parce que ce qu'on fait là, en ce moment, c'est déjà bien, ça suffit ! On ne peut pas faire mieux.≫
Dans ce cas-là, je pense que si, moi je peux, et j'ai même très envie... Autrefois, je réfreinais mes ardeurs pour ne pas entrainer les autres au-delà des limites qu'ils se sont définies, rester dans les normes autorisées.
Alors, voilà ! Pourquoi ne pas sortir de la cage dans laquelle on est placée et pourquoi ne pas aller plus loin si l'on s'en sent capable. Pourquoi jouer un rôle si on y étouffe ? Dans les années 70, j'ai commencé à montrer ce que je faisais à des proches, et un ami m'a dit en voyant un tableau exposé : – Tu ne te mouches pas du pied ? Et en plus tu signes ! Tu te prends pour qui ?
J'étais tellement à l'écoute du regard des autres, apeurée de ce qui peut en découler que je me sentais maladroite, dans un inconfort évident. Et j'avais comme pas mal de gens ce biais qui consiste à être marquée par les critiques négatives. J'ai eu des tas de commentaires élogieux à propos de mes peintures ou de mes écritures mais voyez, j'ai retenu la remarque négative de cet amis (rire!). Dans la vie, il y a toujours des gens qui critiquent, discréditent, ironisent. Mais il y en a d'autres qui adhère à ce que je fais, qui m'ont aider à m'exprimer, qui m'ont poussée à me montrer, à aller plus loin. Aujourd'hui, je suis devant les grilles des expositions ou derrière mon stand de livres, j'enchaine les salons et les événements et je ne suis plus habitée par ce syndrôme de l'imposteur qui me taraudait il y a cinquante ans. Je ne m'occupe plus de savoir si je suis à ma place dans un salon. J'ai envie d'y participer, de rencontrer les gens, de discuter. Aujourd'hui, je ne suis plus touchée par une critique négative, par les discours non constructifs. Je peins comme j'en ai envie, je rugis quand j'ai envie de rugir, je me montre parce que je sais que c'est l'occasion de partager avec des personnes qui comme moi ont compris que c'est dans l'action, la rencontre, l'échange qu'on s'enrichit. Mais surtout je laisse libre court à mon intuition, à mes idées et actions, sans être paniquée à l'idée de sortir du cadre social ou sans m'occuper d'appliquer des princip qui m'emmerdent. Ce qui ne veut pas dire que je n'ai pas de principes... simplement, j'ai ceux que j'ai choisis. Alors, voilà. Ne vous arrêtez pas dans l'élan qui vous soulève. Sautez aussi haut, aussi loin que vous vous en sentez capable.
Petite histoire vécue ce matin :
J'avais depuis longtemps le désir d'avoir des poussins. Raymonde, ma grosse poule blanche ayant commencé à couver ses oeufs clairs (il n'y a pas de coq dans ma volière), j'ai glissé sous elle 8 oeufs fécondés donnés par ma voisine Ginette. Les oeufs ont éclos les 21 et 22 mai 2024. Je les ai laissés sous leur mère adoptive et j'ai mis devant la porte du poulailler une planchette jusqu'à mi-hauteur, de façon à leur barrer la sortie, mais à permettre à Raymonde d'aller et venir dans l'enclos. En bonne mère, elle a tenu ses poussins au chaud sous ses ailes jusqu'à il y a trois jours, puis elle a commencé à descendre du poulailler.
Hier après midi, elle était dehors et un poussin avait réussi à sauter par-dessus la planchette pour suivre sa mère. Je l'ai replacé à l'intérieur de la cabane.
Ce matin, rebelote. Je l'ai remis sur la paille, mais je l'ai à nouveau retrouvé vers sa mère, sur le sol de l'enclos. Les autres poussins, plus obéissants, ou moins téméraires, ou moins agiles, piaillaient à l'intérieur. De guerre lasse, j'ai fini par ôter la barrière et toute la smala est sortie picorer la terre battue. Depuis, ils ne sont jamais très loin les uns des autres, mais ils circulent, courent à droite, à gauche, piaillent, picorent, jouent, s'éclatent, une vraie cour de récré. J'ai sécurisé l'espace bien sûr, bac à eau plat avec des pas japonais pour éviter la noyade, grillage vérifié pour éviter l'intrusion des chats et bouchage du moindre interstice par où pourraient s'échapper ces charmantes bestioles. Moralité : parce qu'un des poussins a osé franchir la limite, il a libéré tous les autres, leur permettant un espace d'exploration et d'ébats quand même moins confiné que la cabane du poulailler.
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